Ayant grandi en ville, on m'a pourtant transmis le bonheur d'être dans la nature. D'observer, d'écouter, ses sons comme ses silences. Et je suis heureuse d’avoir pu sentir, dès l’adolescence, le besoin de m'y diriger. Dans le tintamarre permanent de notre société moderne, où j’ai pu me perdre, m’extraire pour me retrouver au cœur de la nature a toujours été un moyen efficace de me ressourcer, me recentrer, de retrouver du sens, et de me sentir vivante !
Dans le même temps est apparu un besoin de réappropriation de mes choix de vie, et de questionner ma façon d’habiter, de travailler, de consommer, et de me soigner.
Avant de me soumettre à un modèle dominant, j’ai retrouvé l’envie de me poser des questions, de défendre le droit de les poser à un médecin, d’être impliquée dans un processus de soin, d’avoir un droit de regard sur ce que j’ingère ou applique sur ma peau, de réapprendre à écouter mon corps qui parfois, par le biais d’une maladie, exprime ses limites et ses déséquilibres…
Et dans l’idée de retrouver une certaine autonomie, je me suis rendue compte que le domaine du soin n’est pas l’exclusivité des « savants ». Nous sommes les mieux placés quant à l'écoute de notre corps ! Et nous faisons partie de la nature : tout y est pour nous soigner, avec une étonnante corrélation. Nous sommes tous en capacité de préserver notre vie en dialogue avec elle, et donc notre santé. Nous pouvons observer, comprendre, expérimenter, et, si nous le souhaitons, fabriquer nous-même à partir des plantes médicinales, car nous avons tout un héritage traditionnel, souvent féminin d’ailleurs, et aujourd’hui des études scientifiques pour le décrypter. Se réapproprier sa dynamique de soin demande donc d'engager une certaine relation à soi-même, et de mettre en place des actions concrètes pour préserver son équilibre au fil des saisons, dans la durée parfois, d'autant plus dans le soin des troubles chroniques, sans attendre la pilule magique divinement prescrite qui étouffera les maux, ou les "mots" de notre corps.
Consciente que la science et la médecine allopathique ont permis de nombreuses avancées, j’ai également réalisé leurs limites, notamment dans le soin des maladies chroniques, le respect du vivant, l’approche du patient dans sa globalité et la prise en compte de son terrain physique, mental et émotionnel. Il y a tant à dire à ce sujet, que je suis loin de maîtriser… Mais mon souhait le plus cher serait que médecine moderne et traditions croisées des plantes médicinales du monde, puissent marcher main dans la main.
L’herboristerie ça commence donc dans la nature ! Dans les forêts, les prairies, les abords des rivières, les zones humides, les bords de mer… Et quel bonheur de passer du temps seule, ou entourée d'autres cueilleurs et cueilleuses, à observer une plante dans son environnement et comprendre comment, pour y vivre en harmonie, elle a développé, synthétisé telle ou telle énergie, tel ou tel principe actif. Quel bonheur de passer du temps à apprendre à les reconnaître, à ne plus voir l’environnement végétal comme une grande étendue toute verte, mais comme une multitude de communautés de plantes, vivantes, avec leurs identités propres et utiles !
Dans le même temps l’envie de soigner, de faire du bien à mon entourage. J’ai trouvé là une façon de me soigner moi-même, et la sensation d’avoir une place juste dans ce monde.
J’ai été inspirée par différentes traditions, et quelques voyages. Franco-marocaine, j’ai commencé à m'intéresser à l'usage traditionnel des plantes médicinales du Maroc et ai pu réaliser mes premières cueillettes dans le Haut-Atlas marocain. Un voyage en Amazonie péruvienne a également profondément ancré en moi cette intuition du pouvoir des plantes. Le temps de décanter cette expérience et quelques années plus tard, en 2012, au cours de ma première grossesse et vivant à ce moment-là à la campagne, les premières transformations de plantes médicinales étaient nées !
A cette époque beaucoup de lectures, de recherches, et d’expérimentations, nourries par l’envie d’apporter bien-être à mes proches. Puis, décidée à en faire un métier, l’envie de confirmer mon savoir, de développer des acquis, d’avoir une certaine reconnaissance, et d'apprendre davantage, m’ont poussée à engager une formation.
En France le diplôme d’herboriste n’existe plus depuis le régime de Vichy et le développement d'une certaine industrie pharmaceutique. Je me suis tournée vers l’École Européenne d’Herboristerie de Bruxelles, en Belgique, et ai suivi, de 2014 à 2016, une formation de 2 ans par correspondance en Herboristerie Traditionnelle.
J’ai aujourd’hui le titre de « Conseillère en Herboristerie ».
La transformation des plantes médicinales en macérats huileux, baumes et teintures-mères, au-delà du désir enfantin de fabriquer des « potions de sorcière », s’est imposée au départ en accord avec un mode de vie semi-nomade et le souhait d'être capable de me soigner ainsi que mes proches à partir des plantes qui m'entourent, et ainsi de pratiquer la « cueillette sauvage », et le fait de n’avoir à cette époque ni terres de cultures, ni espace suffisant au séchage et stockage des plantes. Je transforme donc les plantes fraîches ou quasi-fraîches, afin de préserver au maximum leur énergie, et leur transformation directe me permet de réaliser une bonne quantité de produits de soin, sans pour autant avoir le besoin de produire, cueillir, sécher et stocker de très grandes quantités de plantes médicinales.
« Mamaznek », c’est moi quand je cueille, quand je transforme, quand je soigne, quand je conseille et quand je vends mes préparations. Depuis 2018 vous me trouvez sur les marchés avec ma petite herboristerie ambulante, et certains de mes produits en dépôt au sein d'épiceries ou de magasins de producteurs.
L’ensemble de ces préparations - baumes, onguents, macérats huileux et teintures-mères - est issu principalement de «cueillettes sauvages», c’est-à-dire de la récolte de plantes dans leur environnement naturel, sur le territoire breton. On trouve des plantes originaires de la lande (bruyère, achillée millefeuille…), des prairies (mauve, millepertuis…), des lisières de forêts (aubépine, églantier, sureau…), des zones humides (consoude, reine-des-près...), du littoral marin (hélichryse…). Des plantes cultivées sont également utilisées (sauge, camomille allemande, mélisse…), ainsi que certaines plantes exotiques, issues de cultures biologiques (gingembre, curcuma, poivre, piment, clous de girofle).
Ces plantes sont récoltées avec une intention particulière, dans des endroits sains, en accord avec les saisons et dans la mesure du possible avec le calendrier lunaire, à l’écoute de leur cycle, au moment où leurs parties utilisées sont chargées du maximum d’énergie. Mon rôle, par le biais de leur macération, est d’en extraire cette énergie et d'en être la... passeuse.